Skip to content

Que représente le mandat VZE pour l’infrastructure de recharge du Canada

L’infrastructure de recharge publique pour les véhicules électriques devra être au moins sept fois plus développée d’ici 2030.

Pour réduire les émissions de carbone du secteur du transport canadien, le nouveau mandat de vente de véhicules zéro émission du gouvernement fédéral exige que tous les véhicules légers neufs vendus au pays soient des véhicules électriques (VE) d’ici 2035, en plus de fixer des objectifs intermédiaires pour 2026 et 2030. La certitude que procurent ces objectifs est exactement ce qu’il faut pour stimuler le déploiement d’une infrastructure de recharge – soit, pour les besoins de cette analyse, l’ensemble de l’équipement de recharge public, qui exclut les bornes résidentielles – pour maintenir les VE à flot. Mais pour répondre à la demande en VE, il faudra multiplier considérablement le nombre de bornes de recharge publiques d’ici 2030.

Les gouvernements et les entreprises foncent à vive allure

Heureusement, on constate déjà des engagements substantiels tant du secteur public que du secteur privé pour la construction des stations de recharge nécessaires.

Depuis 2016, le gouvernement fédéral s’est engagé à consacrer 1,25 milliard de dollars au déploiement de cette infrastructure. Le but : l’ajout de 85 000 bornes de recharge financées par l’État au réseau national d’ici 2027. Les provinces et les municipalités se sont aussi dotées de programmes de recharge, comme le Electric Vehicle Charging Funding Program de l’Île-du-Prince-Édouard et l’EV Strategy de Toronto, qui prévoit des projets pilotes pour l’installation de bornes dans toute la ville. Les entreprises commencent aussi à rejoindre le mouvement. Par exemple, Alimentation Couche-Tard a commencé à installer des bornes de recharge dans beaucoup de ses dépanneurs l’an dernier.

Jusqu’à présent, ces programmes ont contribué à mettre en place près de 20 000 bornes publiques d’un bout à l’autre du pays, notamment par les précurseurs ChargePoint, FLO, Circuit Électrique et Tesla. Selon les dernières données de 2021 de Statistique Canada, 238 581 VE utilisent le réseau national, soit environ 13 véhicules par borne non résidentielle au pays (voir figure 1). 

Le ratio VE-borne idéal est assez variable : il faut s’attendre à ce qu’il augmente au fil du temps. À l’heure actuelle, ce ne sont pas les longues files devant les stations de recharge qui posent problème, mais plutôt la couverture du réseau et la rareté des bornes sur de longues distances. Cependant, en regard du nombre grandissant de VE sur la route et du raccourcissement des distances entre les bornes, on prévoit actuellement qu’un ratio de 24 VE par borne en 2030 serait viable, vu le foisonnement attendu des bornes résidentielles au Canada attribuable au nombre élevé de maisons unifamiliales.

Figure 1: Bien que l’on compte 13 VE par borne de recharge au Canada, l’accessibilité des bornes varie d’un endroit à l’autre.

Dépasser les attentes

L’initiative 440 mégatonnes a fait quelques calculs pour déterminer si le déploiement des bornes va bon train et déterminer le nombre d’ajouts nécessaires d’ici 2030. Nous nous sommes servis des prévisions sur les VE du scénario des politiques annoncées dans le Plan de réduction des émissions pour 2030, modélisé par Navius Research pour l’Institut climatique du Canada, qui tient compte du mandat VZE proposé. Nous avons aussi utilisé les ratios VE-borne du scénario de Dunsky, modélisé précisément pour le contexte canadien, qui prévoit une prépondérance des bornes résidentielles (20 VE par borne d’ici 2025 et 24 d’ici 2030) (figure 2). 

Sans tenir compte d’éventuels engagements d’autres gouvernements et du secteur privé, l’objectif fédéral de 85 000 bornes permettrait de répondre à la demande prévue dans le scénario de 20 VE par borne d’ici 2027 de Dunsky. Toutefois, étant donné l’explosion des VE prévue d’ici 2030, l’infrastructure de recharge accessible publiquement doit croître d’au moins 150 000 bornes pour atteindre le ratio de 24 prévu par Dunsky. L’atteinte de cet objectif nécessitera un développement important du réseau de recharge par les gouvernements et le secteur privé.

Figure 2: Le nombre de bornes de recharge publiques devra augmenter considérablement pour suivre la progression des VE.

Il est important de garder à l’esprit que la réussite de cette transition ne repose pas que sur le nombre de bornes disponibles, mais aussi sur l’emplacement de ces dernières. L’accès équitable devrait être une priorité. Le gouvernement pourrait ainsi intervenir davantage dans les endroits où les conditions du marché découragent l’installation de bornes par des entreprises privées. Plus particulièrement, il devra concentrer ses interventions dans les collectivités rurales et isolées ainsi que dans les zones urbaines où l’accès aux bornes résidentielles est restreint, comme les immeubles résidentiels à forte densité.

Globalement, le déploiement du réseau de recharge public dans une optique de transition énergétique au Canada demandera la concertation de tous les ordres de gouvernement, ainsi que des entreprises. Le mandat VZE fédéral permet de mieux prévoir la demande d’infrastructure de recharge. Il faut maintenant appuyer sur l’accélérateur et s’assurer que l’infrastructure garde le rythme – et que des bornes soient là quand on en a besoin.


Arthur Zhang est associé de recherche à l’Institut climatique du Canada et pour l’initiative 440 mégatonnes.